Expert auteur de l’ouvrage « Ces chrétiens qu’on assassinent » « C’est une réponse à l’Occident. En Orient, les actes de représailles arrivent toujours avec retard. »
Le massacre de chrétiens, à Bagdad, vous surprend-il ?Que vous inspire cette tragédie ?
Tout récemment, Mgr Louis Sako, archevêque chaldéen de Kirkouk dans le nord de l’Irak, évoquait avec moi cette folie du pasteur américain, Terry Jones, qui voulait brûler le Coran. Il m’expliquait que cette menace attisait la haine des fondamentalistes musulmans et que, depuis cet évènement, les agressions contre les chrétiens se multipliaient. Il était extrêmement inquiet car, pour un djihadiste, les chrétiens représentent une entité unique. Les fondamentalistes ne font pas la différence entre les uns et les autres. Aujourd’hui, oui, je fais le rapprochement avec ce d’arriver à Bagdad. C’est une réponse à l’Occident. En Orient, les actes de représailles arrivent toujours avec beaucoup de retard. Il faut savoir que la moindre chose décidée ici a des répercussions là-bas. C’est le même problème avec la promulgation de la loi sur la burqa qui a entraîné les menaces contre la France.
Plus largement, quelle est aujourd’hui , la situation des chrétiens en Irak ?
Elle est terrible. Les femmes sont obligées de sortir voilées à la musulmane pour se fondre dans la masse, pour passer inaperçues. Il y a des mariages forcés. Des jeunes femmes chrétiennes sont enlevées par de jeunes islamistes, violentées, forcées de réciter la profession de foi qui signe leur conversion à l’islam, puis épousée de force. Dans ces cas, la famille ne peut plus rien. Cela arrive aussi en Égypte. C’est une pratique en développement. Puis il y a des attaques directes, des enlèvements contre rançon.
Ces persécutions croissantes poussent-elles les chrétiens à fuir le pays où est né le christianisme ?
Oui et c’est tout le dilemme. En Égypte, 1,5 million de coptes ont quitté le pays au cours de ces dix dernières années. Ils s’installent au Canada et aux États-Unis et ne reviennent jamais. En Irak, on ne sait plus exactement combien de personnes appartiennent à la communauté chrétienne. Ils estiment eux-mêmes être entre 200 et 300 000, mais ces chiffres ne sont pas fiables. La situation n’est pas trop mauvaise en Turquie, Syrie et Jordanie où les chrétiens vivent entre quiétude et inquiétude. Au-delà du monde musulman, en Inde du Sud, les chrétiens sont massacrés et brûlés dans les églises par des fondamentalistes hindouistes. Partout, ceux qui fuient ne reviennent pas. On a l’exemple du Liban. Les chrétiens qui ont quittés le pays n’y sont pas revenus après la guerre.